mardi 16 février 2016

Joachim Du Bellay (1522-1560)

  • Les Regrets / de Joachim Du Bellay, angevin, collationnés sur la première édition, Paris, 1558.- Paris (5, rue Scribe) : Isidore Liseux, 1876.- XI-131 p. ; 15 cm.

[AVERTISSEMENT DE L’ÉDITEUR]

L'accueil très-bienveillant qui a été fait à notre édition Elzevirienne des Jeux Rustiques de Du Bellay, nous a engagé à donner aussi cette réimpression des Regrets. Le chantre « du petit Lyré » est de plus en plus en faveur, et l'on peut répéter, sans crainte d'être démenti, ce que son contemporain La Croix du Maine disait de ses œuvres il y a trois siècles : « elles vivront autant que dureront les langues èsquelles il a escrit ».

Un critique plein de goût et d'érudition, M. Becq de Fouquières, vient justement d'en publier une édition populaire, sous le titre d'Œuvres choisies. Les notices, les commentaires se succèdent avec rapidité. Aussi notre tâche est-elle singulièrement simplifiée : à peine avons-nous besoin, pour expliquer le titre de ce Recueil, les Regrets, de rappeler l'exil volontaire que le jeune poète s'était imposé en suivant à Rome son parent le Cardinal, exil dont il cherche à se consoler par les malices et les expansions de ce journal poétique. Il nous suffira donc de continuer ici ce que nous avons commencé avec le premier recueil : la réimpression fidèle de textes originaux devenus introuvables, et que ne sauraient remplacer à aucun titre les éditions posthumes, plus incorrectes les unes que les autres, auxquelles sont réduits les bibliophiles.

La présente édition est plus complète qu'aucune de ses devancières, sans en excepter l'édition originale (Paris, Fédéric Morel, 1558, in-4°). Toutes, en effet, ne contiennent que cent quatre-vingt-trois sonnets : la nôtre en a cent quatre-vingt-onze. Les huit sonnets supplémentaires (CV à CXII) sont tirés de l'exemplaire peut-être unique de l'ancienne Bibliothèque du Roi, à présent Bibliothèque Nationale (Y, 4593), lequel a échappé aux recherches du savant éditeur, M. Marty-Laveaux, car ces huit sonnets manquent à sa collection des Œuvres complètes de Du Bellay (Paris, Lemerre, 1866). On n'a qu'a y jeter les yeux pour comprendre ce qui les avait fait exclure même de la première édition, et pourquoi il en avait été imprimé un carton exclusivement destiné à l'exemplaire Royal : les plaisanteries plus ou moins légitimes sur le Jupiter du Vatican et ses cinquante Ganymèdes (sonnet CVI) pouvaient se chuchoter à l'oreille de son Très-cher Fils Henry II, mais quel scandale si elles eussent couru dans le vulgaire ! Aujourd'hui, fort heureusement, tout cela n'est plus que de la satire, ou de l'histoire (comme on voudra), et nous pouvons sans peur offrir aux curieux le régal de ces médisances réservées : un véritable morceau de roi

I. L.